Première leçon, la droite est largement majoritaire à l’assemblée !
C’est une évidence, mais à force de faire croire que la gauche pourrait avoir un premier ministre, de Mélenchon affirmant « élisez-moi premier ministre » à Lucie Castet, désignée par le NFP, certains ont finit par l’oublier. Depuis 2017, les deux tiers de l’assemblée sont à droite ! Il n’y a aucune chance d’avoir une politique de gauche sur aucun plan, et tout ceux qui continuent à ne mobiliser les forces sociales que pour les prochaines élections nous enferment dans une impasse, pendant que l’extrême-droite progresse et exploite toutes les impasses du « en même temps »…
L’occasion était trop belle pour les républicains et le RN d’exploiter la contradiction de cette loi en votant sa suppression, alors que cette loi est au fonds leur invention ! Elle a été portée en 2019 par des députés macronistes, centristes et de droite comme Benoît Huré, Didier Mandelli (Les Républicains), Françoise Gatel (UDI), Bruno Millienne (MODEM), et de nombreux députés macronistes. Ils étaient tous d’accord pour réduire la programmation d’investissements pour les transports publics, reporter notamment le CFAL sud, et pensaient donner une couleur environnementale à leur loi mobilité en créant les ZFE…
Dans la métropole, Mr Gascon, le maire de Saint-Priest, demandait en 2019 que la ZFE proposée par le président Kimelfeld soit étendue à sa commune pour bénéficier elle aussi de la qualité de l’air, dénonçant un périmètre limité à Lyon comme injuste ! Trois ans plus tard, et désormais dans l’opposition à la majorité métropolitaine, il change d’avis et dénonce une ZFE injuste…
On ne sortira pas de la crise démocratique en s’enfermant dans des polémiques électoralistes…
Deuxième leçon, il faut sortir de l’opposition entre environnement et égalité sociale !
C’est le cœur de la création des ZFE, imposer une contrainte environnementale en oubliant, voire pire, l’égalité sociale. Mais c’est le fonds de beaucoup de politiques environnementales qui se concentrent sur la consommation, les modes de vies, les comportements individuels, sans s’intéresser à la production, aux investissements, aux conditions de travail. Or les salariés sont souvent les premiers concernés par l’impact environnemental d’une production, comme on le voit dans la Chimie.
Il faut donc l’affirmer plus clairement. Les premières mesures écologistes sont les mesures pour l’égalité sociale, l’action contre les injustices et les ségrégations. La « transition environnementale » commence par le recul des inégalités ! Quand on développe le photovoltaïque individuel que paient tous les consommateurs mais qui ne bénéficient qu’aux propriétaires de toits, on fait un contresens anti-écologique… en oubliant d’ailleurs qu’un système électrique non pilotable massivement est une impasse. La déclaration pathétique d’une ministre espagnole reprochant à la France l’insuffisance des infrastructures haute tension à travers les Pyrénées pour justifier le black-out qu’a connu la péninsule ibérique est révélatrice. On fait du solaire parce-que des acteurs privés y trouvent de fortes rentabilité, en se comportant comme des rentiers qui reportent les contraintes sur les autres. Le photovoltaïque n’a de pertinence qu’avec de l’autoconsommation et du stockage, ce qui suppose des politiques publiques d’ampleur.. loin du marketing de « votre toit vous enrichit »…
Energie, Mobilité, Alimentation, il faut redéfinir les politiques environnementales en partant des enjeux sociaux, de la nécessité de répondre aux besoins de tous. Nous n’avons pas besoin d’agriculture bio pour quelques uns, nous avons besoin d’une politique agricole de qualité pour tous ! C’est la base pour retisser des liens de solidarités avec les agriculteurs et affirmer par exemple « urbains - agriculteurs, solidarité ! »
Troisième leçon, les mesures environnementales efficaces sont toujours collectives !
Ce qu’a montré les difficultés de mises en œuvre de cette loi ZFE, c’est la complexité de dispositifs qui cherchent des responsabilités individuelles, qui supposent que le fonds des problèmes environnementaux sont dans les modes de vies, les comportements. Pour la ZFE, on cherche alors à compenser l’injustice par des dérogations, permanentes, temporaires, des aides sélectives, des moyens d’accompagnement à la gestion individuelle des mobilités… Mais on ne se fixe pas d’objectifs clairs de réponses publiques au besoin de mobilité non polluante. En quelque sorte, pour la loi ZFE, la qualité de l’air n’est pas un problème collectif, mais un problème individuel. Chacun doit choisir la bonne mobilité pour ne pas polluer, et le rôle de la puissance publique se concentre sur les moyens de contrôle pour faire respecter la « bonne mobilité ». Pourtant, tout le monde l’a dit ou presque, il faudrait que les objectifs de la ZFE soit planifiés en fonction du développement des mobilités alternatives et notamment des transports en communs. Dans la métropole de Lyon, c’est notamment le RER métropolitain et les trams et métros.
Sauf que ces sujets sont discutés en dehors de la ZFE, et marqués par les limitations budgétaires qui font que la région renvoie l’essentiel du RER à plus tard, que l’état renvoie les infrastructures rail globales qui conditionnent le RER à plus tard, et que la métropole considère qu’elle ne peut faire plus que ce qui est inscrit dans le PDU en élaboration, PDU qui marque un ralentissement du développement des transports en commun par rapport au précédent [5]
Et bien sûr, l’état se défausse sur les collectivités, renforçant le sentiment d’injustice car les collectivités pourront faire en fonction de leurs moyens, donc de leur richesse, et qu’on se retrouve avec des ZFE dans deux seules agglomérations.
Il faut donc redire que la meilleure réponse à la qualité de l’air urbain est dans le développement massif des transports publics, de manière plus générale dans l’électrification massive des transports, report du fret sur le rail, développement massif du rail, des RER, des métros et trams pour que la part modale de la voiture dans les agglomérations diminue fortement et avec elle les bouchons et les pertes de temps associés, mais qu’elle garde une place utile dans beaucoup de situations, périphéries urbaines, personnes âgées, jeunes enfants, vacances et tourismes, déplacements médicaux, forains et commerces… ou tout simplement fatigue et mauvais temps…
Conclusion politique…
Ce piège de la loi ZFE est révélateur de la crise démocratique de notre pays, de l’inefficacité de la représentation parlementaire à porter des débats utiles, clairs. Personne n’y comprend plus rien. Ceux qui ont rédigé une loi peuvent quelques années plus tard la dénoncer. Ceux qui dénoncent dans l’opposition peuvent soutenir une fois au pouvoir et inversement. La plupart des lois affichent des intentions louables, personne ne propose l’augmentation de la précarité, des inégalités, des injustices, et pourtant l’effet concret des lois qui se succèdent, c’est bien plus de précarité, d’inégalités, d’injustices…
Pourtant, notre constitution hérite théoriquement de cette déclaration des droits de l’homme écrite en 1789 qui affirme dans son article 2 que « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression. ». Mais la force de cette déclaration était liée à un peuple debout, organisé, mobilisé… Que faire deux siècles plus tard ?
Je le dis en toute franchise à tous les militants de gauche, et surtout à tout le monde du travail, à tous les milieux populaires, rien ne viendra d’en haut ! Pour bousculer ce piège médiatique et politicien, il faut un large mouvement populaire, des millions de citoyens qui s’organisent, discutent, proposent, vérifient, et surtout font le lien avec l’expérience pratique, leur expérience pratique. Nous n’avons pas besoin d’un débat en chambre, genre plein de conventions citoyennes organisées par les institutions pour produire un rapport de plus. Nous avons besoin de citoyens organisés qui interviennent dans les décisions concrètes, mesurent les résultats, tiennent compte des erreurs, des ratés, pour corriger les décisions…
C’est ce que tentent de reconstruire les communistes qui veulent faire revivre un grand parti communiste d’action, d’unité, d’éducation populaire…